De ma fenêtre je voyais le port
La vue plongeante sur le port capte le regard. Un énorme cargo est à quai dans le grand bassin, chargé de containers. Que contiennent-ils ? Sont-ils pleins ? Sont-ils vides ? Tout le mystère du voyage en mer.
Il faut faire un effort pour arracher son regard de ce spectacle fascinant et observer tout le paysage. Le clocher d'une église, l'obélisque et une multitude de toits.
En tournant la tête sur la gauche, très à gauche, une anse sauvage et la mer d'un bleu outremer intense. Elle scintille au soleil. L'horizon est une ligne très marquée entre le bleu pâle du ciel et celui plus foncé de l'eau. Cette image-là aussi est forte, vivante, toujours en mouvement.
Les jours de grand vent, la mer moutonne avec colère. Elle prend des teintes brillantes, éblouissantes. On aperçoit le phare perché sur ses quatre colonnes métalliques et qui paraît tout petit vu d'ici.
Six collines entourent la ville en arc de cercle. A gauche, vers l'est, le cap Béar en impose par ses pentes raides et arides. Vers le sud, un petit hameau s'étale au soleil. A l'ouest, dans le lointain, sur la plus haute colline, la tour Madeloc veille.
Sur les pentes de la dernière colline à droite, des barres de grands immeubles disgracieux viennent contredire la douceur de ce paysage. Un peu en arrière, on aperçoit enfin le fort Saint-Elne.
Et le regard replonge vers le port, ses quais déserts depuis que le cargo est parti, ses longs bâtiments, ses grues. Vers la gauche, la passe n'est pas visible, masquée par une petite colline au-dessus de l'église. Vers la droite, on ne voit pas non plus le fond du port, ses bateaux de plaisance et ses chalutiers.
Entre la terrasse de l'immeuble et le bassin portuaire, tout un quartier groupé autour de la place de la Liberté. Les toitures sont surtout de tuiles couleur brique. Les façades, toute une palette, du blanc à l'ocre foncé, en passant par un dégradé savant qui évite la monotonie. Quelques éléments émergent de cette mosaïque. Des terrasses, des cours, des escaliers, des arbres, le dôme du Fer à cheval, des vélux, la rue au premier plan.
La nuit tombe peu à peu. Les lumières du port s'allument créant une belle ambiance de nuit américaine. Des reflets dans l'eau comme une longue flamme jaune. Les couleurs des maisons s'estompent doucement, seulement éclairées par quelques réverbères.
Maintenant le ciel est noir sur la ville endormie. Ne subsistent que de rares lumières. La pleine lune éclaire le ciel et illumine les nuages. Et du côté de la mer, le clignotement du phare dans un noir total.
Jean-Luc Dugied
Port-Vendres, avril 2024