Balcon avec vue

Au premier plan, la rambarde du balcon. Une longue barre ronde horizontale, d’un bleu franc agréable au regard. En dessous deux barres plus fines servent de garde-fou très ajouré. Ces trois barres interrompues par deux montants verticaux.
Au second plan, sur la gauche, un olivier planté dans le sol de la terrasse inférieure. L’arbre est grand, fort, noueux, chargé d’olives vertes. Sur la droite, un pin. Deux troncs tordus se croisent, s’entremêlent.
Au troisième plan, le toit de tuiles rondes d’un petit immeuble. L’œil est sélectif, mais oui, il faut l’admettre, il y a sur ce toit des antennes de télévision. Et de temps en temps, un goéland vient se percher, crier son secret, miauler, déployer ses ailes pour repartir.
Plus loin, en face, le village, étagé, mélange de maisons anciennes ou récentes, imbroglio de toitures, de façades, de terrasses, de loggias dans lesquelles le blanc pur domine.
Légèrement sur la droite, la masse solide de l’église, son clocher gris, ses murs blancs, ses contreforts et un bâtiment formant tour sur le côté.
Enfin, au loin et pourtant si proches, les tons bleu vert de la Méditerranée. C’est par là qu’il faudrait commencer, cette surface aujourd’hui si lisse, si calme, attire l’œil inévitablement. C’est le point d’orgue du tableau. Le soleil matinal se reflète dans l’eau, éclaboussant de lumière, éblouissant aussi.
Quelques bateaux de plaisance, bien peu en cette saison après les excès de l’été. Le bout du village, quelques rochers à contre-jour. Et sur la droite, en se penchant un peu, le Cucurucuc, amer sauvage à la sortie de la baie.
Plus proche, dépassant à peine des maisons blanches d’Es Baluard, pointe le beaupré du San Isidro, le voilier catalan.
L’ambiance est calme, paisible, un bateau de croisière traverse la baie, emmenant les derniers touristes. En tendant l’oreille on distingue quelques sons. Des travaux en dessous dans la cour de l’immeuble, le vent, le bruit des vagues, des goélands piaillent, un volet qui s’ouvre en grinçant, les enfants dans la cour de l’école, un moteur de bateau, le carillon de l’église.
L’air est frais, matinal, mais reste doux. Le vent est léger, les branches de l’olivier remuent doucement. Et le ciel d’un bleu pâle avec quelques discrets nuages blancs. Tout respire la sérénité, la quiétude, le repos.
Très loin, au-delà de la pointe, la pleine mer étale sa courbe de l’horizon comme une invitation au voyage.

Jean-Luc Dugied
Cadaqués, octobre 2023